Le 4ème festival francophone de philosophie se déroule à Genève, du 25 au 28 septembre 2008. Un programme hétéroclite, qui se devait de répondre à l’ambition de la thématique annoncée : la peur. Des intervenants économistes, sociologues, médecins ou… philosophes se sont mis en tête de répondre à nos angoisses. Et en cette soirée du 26 septembre, l’orateur qui avait pour tâche de se pencher sur la peur de l’islam n’était autre que la quasi rock-star, l’enfant chéri des médias, l’homme qui cristallise une partie des fantasmes francophones : Tariq Ramadan. Court de rattrapage pour ceux qui étaient sur Mars ces dernières années, le fameux débat Sarkozy-Ramadan sur France2. C’était avant l’élection de Sarkozy.
Sous l’intitulé « la peur de l’islam, et l’islam face à nos peur », Tariq Ramadan s’est efforcé de brosser un catalogue des différentes peurs face à l’islam, d’en démontrer leur côté parfois paradoxal, ou encore de rappeler combien le retrait des musulmans dans les sociétés occidentales est condamnable; le condamné étant… le musulman lui-même.
Et de rappeler que les angoisses d’une crise économique s’affronteront avec les frayeurs de l’immigration; puisque d’un côté, l’Europe se radicalise, le discours liant immigration et sécurité (et identité nationale en France, aurait-il dû ajouter) s’est banalisé, alors que dans le même envol ce continent aura besoin de dizaine de millions d’immigrés pour pallier sa population vieillissante. Le conflit d’intérêt, entre ceux pour qui l’immigration est un préjudice et ceux pour qui elle est un bénéfice, pourrait se radicaliser à l’avenir.
Ou d’ajouter que les musulmans ne doivent pas rester passif dans leurs sociétés; de deuxième, troisième génération (pour la dernière vague), il est temps de cesser de parler d’intégration pour les citoyens de confessions musulmanes d’origine étrangère. L’intégration, c’était la problématique de leurs parents, fantômes au milieu de sociétés qui les voulaient invisibles. On les a donc parqués hors du champs politique; le décalage vient, selon Ramadan, du fait que les générations actuelles s’impliquent, occupent l’espace public, deviennent visible. D’où le débat, puisque auparavant, on ne voyait pas ces immigrés, parqués dans des banlieues construites pour l’occasion ou des quartiers sordides. L’ancien professeur genevois plaide pour que les hommes et les femmes de confession musulmanes se saisissent de leur avenir, et prennent part autant que possible au processus décisionnels.
Enfin, de remarquer, presque sans sarcasme, qu’il est difficile de savoir si la démocratie et l’islam sont des modèles viables, puisque les pays musulmans – en particulier le Golfe – ne sont pas des démocraties, mais des dictatures. Et des dictatures soutenues par l’Occident, sans qui elle ne se maintiendraient certainement pas si facilement au pouvoir. Le paradoxe est ici perfide, entre ceux qui exigent, au nom de la sécurité et des idéaux, la démocratie au Moyen Orient mais qui dans la foulée, et défiant toute logique, soutiennent ceux-là même qui n’instaureront jamais la démocratie, puisqu’elle signifierait la fin de leur carrière de pétro-monarque. L’allusion de l’intellectuel était plus subtile, cependant, je suis bien trop didactique.
En somme, de quoi a-t-il été question : d’ouverture sur l’étranger, de remise en question des dogmes et de participation active à la communauté, ou encore de l’hypocrisie occidentale dans son refus de soutenir les forces démocratiques en terre d’islam. Ce qui m’a amené, à nouveau en écoutant Tariq Ramadan, à m’interroger sur les raisons de ses inimitiés. Enfin, de quoi parle-t-on lorsqu’on le vilipende ? Y a-t-il des faits objectifs, qui dépassent le fantasme de voir un musulman cultivé, maniant l’art oratoire avec talent, et parlant de tolérance et responsabilité personnelle ? Petit-fils du fondateur des Frères musulmans, il est vrai que l’ascendance n’est pas des plus rassurantes; mais je peine à me faire à l’idée qu’il y aurait un « double discours » Ramadan. Il a écrit des dizaines de livres, donne des interviews à la pelle, se prête au jeu des conférences à peine descendu de son avion; il a une activité bouillonnante, et il me semble, peut-être naïvement, que si il y avait hypocrisie dans ses thèses, un « double langage » les procès auraient été légion, et auraient dépassé le stade de « l’opinion ». D’autant plus qu’il n’hésite pas à condamner durement ses concitoyens, ses correligionnaires, à faire des droits de l’homme la pierre de touche de sa pensée.
Il ne suffit pas de se déclarer intellectuel, réformiste, humaniste pour l’être; mais il ne suffit pas non plus de taxer d’hypocrite – l’une des pires insultes pouvant être proférée à l’encontre d’un musulman – un individu, même si répété à l’unisson, pour qu’il le soit. Encore faut-il le démontrer.
Salut, je pense qu’il y a un grand fossé entre l’occident et l’orient. Les occidentaux pensent qu’ils pourront imposer leur vision de la démocratie à tous les pays en se foutant complètement de la tradition, de la culture, c’est devenu flagrant avec les pays musulmans, je ne vois pas une seule émission sur l’Islam sans ressentir de la part du média une certaine condescendance et une arrogance. On peut aussi généraliser et remarquer l’attitude des pays du nord face au pays du sud. quand j’ai écouté le discours de Dakar par Sarkozy, j’ai eu l’impression qu’il s’adressait non a des intellectuels universitaires mais a des enfants attardés.