Jeune UMP pour le Contrat Première Embauche (CPE)

C'est ici que tout ce qui concerne les sujets du blog peut être évoqué. C'est un bon moyen de continuer une discussion un peu "à l'étroit" :)
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psykotik
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Jeune UMP pour le Contrat Première Embauche (CPE)

Post by psykotik »

Sujet d'origine :
Après ma dernière réponse à un libéral français, ce qui a poussé la barre de ce blog très à gauche, quoi de mieux pour le rééquilibrer que la tornade soufflant de la droite libéralo-conservatrice parisienne. L'un des mes amis m'a fait parvenir un texte dans l'optique d'apparaître sur ce blog, et dans un souci de rééquilibrage idéologique, je ne pouvais faire autre chose que le publier.

Je vous laisse avec la prose de Damien. Je m'octroierai certainement un droit de réponse ici même, car bien que partageant son point de vue sur le manque de projet de société d'envergure à gauche, je suis en profond désaccord avec lui sur de nombreux points.
***

Demain aura lieu la troisième manifestation " anti-CPE " organisée par les étudiants et désormais certains lycéens français.
Avant toute chose, il est bon de rétablir quelques vérités sur la nature de ce Contrat Première Embauche (CPE) adopté par le parlement dans le cadre de la loi sur l'égalité des chances, et proposé par le Premier Ministre, Dominique de Villepin.

Sur le fond tout d'abord : Il s'agit d'un contrat à durée INDETERMINEE destiné aux jeunes de moins de 26 ans. La différence principale entre un CDI classique et ce CPE réside dans la durée de la période d'essai, qui est de deux ans pour le second. Un employeur peut donc, s'il a recours à un CPE, librement licencier son salarié durant cette période de deux ans. C'est cela principalement que certains étudiants critiquent, mettant l'accent sur la précarité présumée d'un tel contrat.

Ils tentent ainsi de nous faire croire que le jeune bénéficiaire d'un CPE peut être licencié sans préavis ni indemnités : C'est faux. L'employeur est tenu de donner un préavis d'un mois, et de verser au moins un demi-mois de salaire s'il procède à un tel licenciement.
Ils mettent l'accent sur le chômage des jeunes. Là encore, le CPE ne fait qu'améliorer les choses, en permettant aux jeunes licenciés de toucher les allocations après seulement 4 mois de travail, alors qu'il en fallait 6 en CDI auparavant.

Ces jeunes réclament des CDI. Qu'ils sont loin des réalités économiques et du marché du travail actuel. Il est aujourd'hui rare pour un jeune, même bien diplômé, de trouver un CDI dès sa sortie de l'université ; cela n'est réservé qu'à une minorité, celle des grandes écoles, ainsi que les filières spécifiques, comme le droit où la médecine. La réalité aujourd'hui, c'est le CDD, le stage et l'intérim, situations autrement plus précaires que le CPE proposé : Un contrat d'une durée de trois mois renouvelable une fois au maximum sans allocations chômage à la fin, du travail à mi-temps, ou bien, un stage dont la rémunération est trop souvent bien en dessous de la valeur du travail fourni.

Autre argument invoqué par les "étudiants grévistes " pour renforcer cette idée de " précarisation " des jeunes du CPE : Il ne permet pas de contracter des emprunts bancaires. Là encore, c'est une belle contre-vérité : Le CPE est considéré comme un CDI aux yeux de la loi, et s'impose comme tel aux organismes de prêts. On ne peut pas laisser sous-entendre que ces organismes iront à l'encontre de la loi en refusant des prêts (s'ils sont raisonnables) sur la seule base que le demandeur dispose d'un CPE.

Sur la forme ensuite : Les partis politiques de gauche et les syndicats étudiants mobilisés contre le CPE ne cessent de répéter qu'il a été adopté grâce à l'utilisation de l'article 49-3 de la constitution qui permet l'adoption rapide d'un texte législatif. Il s'agit là encore d'un formidable mensonge et d'une belle preuve de mauvaise foi de la part des responsables de ces partis et organisations syndicales. Le CPE a bel et bien été voté par le parlement, après plus de 125 heures de débat. L'article 49-3 a été utilisé par le gouvernement pour faire passer la suite du texte sur l'égalité des chances pour mettre fin aux innombrables amendements déposés par l'opposition afin de ralentir les débats. Il est intéressant de noter que la suite de ce texte ne fait l'objet d'aucune contestation de la part de cette même opposition. C'est donc uniquement pour faire obstacle à la démocratie que la gauche ne cesse, depuis 2002, d'avoir recours à cette tactique des amendements multiples pour ensuite accuser la droite de faire passer les réformes en force !

Si le CDI reste bien entendu l'idéal, le CPE facilitera de facto l'emploi des jeunes. Un employeur a en effet tout intérêt à embaucher en CPE plutôt qu'en CDD ou intérim puisqu'il est désormais libre de licencier sans que ça ne lui coûte un centime d'euro. Du coté du jeune il est bien entendu mieux de signer un CPE plutôt qu'un CDD voire pas de contrat de travail du tout. Il est faux de croire que les employeurs licencieront par plaisir leurs jeunes employés durant la période de deux ans, ou les remplaceront juste avant la fin de la période d'essai par un autre CPE pour relancer celle-ci (manoeuvre au demeurant interdite par la loi, cela va de soi). Ce CPE répond à une réalité économique et entrepreneuriale ; on ne sait en effet pas si une activité va marcher quand on la lance, ni combien d'employés seront nécessaires.

Le CPE n'est pas la solution miracle pour relancer l'emploi en France, mais il introduit enfin un peu de flexibilité dans un pays qui en manque cruellement. Il faudrait des mesures bien plus radicales pour faire baisser le taux de chômage dans notre pays, ces solutions sont connues, mais par manque de courage politique, les gouvernements successifs refusent de les mettre en oeuvre. La première d'entre elles est une baisse radicale des charges patronales sur les bas salaires. Il est anormal qu'un smicard qui touche 1200 euros en coûte 2400 à son employeur. On sait que nous manquons de main d'oeuvre dans les secteurs du bâtiment et de la restauration notamment, et le coût du travail pour les entreprises en est la raison principale, qui préfère aussi recourir de ce fait au travail au noir avec les conséquences que l'on sait.

Au-delà du CPE, les contestations de ces derniers jours soulèvent un problème bien plus grand auquel doit faire face la France d'aujourd'hui. Depuis 25 ans, et l'évènement d'un certain François M. ce pays est incapable de réformer quoique ce soit. La moindre mesure nouvelle qui vient un tant soit peu bousculer l'ordre établi entraîne une vague de manifestations bien trop souvent basées sur une incompréhension totale des textes incriminés et sur une volonté systématique de blocage de la part des syndicalistes et de certains partis politiques irresponsables. Il est étonnant de constater qu'à peine 8% des français sont syndiqués et que pour autant, les organisations syndicales ont un pouvoir énorme de nuisance. L'opposition au CPE en est encore une fois un parfait exemple.

Qu'avons-nous ? D'un côté le gouvernement de droite qui propose d'essayer une nouvelle formule de contrat de travail et de faire le point dans six mois. Le CNE, grand frère du CPE et mis en place il y a 7 mois a d'ores et déjà permis la création de près de 50 000 emplois nouveaux. L'an dernier la France a vu la création nette de 140 000 emplois. Preuve que les mesures gouvernementales, en ces temps de faible croissance, ne sont pas si mauvaises que ça. De l'autre, des syndicats étudiants, essentiellement l'UNEF. Il faut savoir que l'UNEF réunit une trentaine de milliers d'adhérents, la Confédération étudiante (proche de Dominique Strauss-Kahn) 2000, les autres, d'extrême gauche (PCF et LCR) étant encore plus marginaux. Sur près de trois millions d'étudiants en France, c'est faible, très faible. Ces syndicats ont organisé de force des votes dans les diverses facultés pour littéralement forcer les étudiants à faire la grève. Ainsi, on a compté jusqu'à 47 universités fermées de force par une minorité d'étudiants manipulés par la gauche, car c'est véritablement de cela qu'il s'agit. Les votes se font à main levée, bien souvent sans demander la carte d'étudiant. On ne laisse pas en outre les étudiants non grévistes s'exprimer en baissant le son du micro ou en le leur enlevant carrément des mains comme ça a été le cas hier à Marne-la-Vallée. Certains doyens d'université ont pris position en faveur du mouvement, allant même jusqu'à interdire aux professeurs non solidaires de continuer à faire cours (à Dijon). Ces doyens devraient être remplacés par le rectorat, mais là encore un mal bien français les protège, celui du fonctionnariat, mais c'est là une autre question.

Le point culminant et hautement symbolique de ce mouvement a été l'occupation de la Sorbonne historique. Les étudiants y ont saccagés les installations électriques et le chauffage, résultat : 1 million d'euros de dégâts, aux frais du contribuable. Ces blocus d'universités sont illégaux, comme l'ont d'ailleurs reconnus tous les tribunaux administratifs qui ont eu à connaître des référés liberté déposés par les étudiants souhaitant aller en cours et préparer sereinement leurs examens.

Ca fait maintenant plus de dix jours que la Sorbonne est fermée et protégée par des gendarmes mobiles et CRS. Hier les manifestations ont encore débordées. La police a fait preuve d'un grand courage et d'une maîtrise d'elle-même tout a fait exceptionnels, se laissant insulter par une bande de voyous qui ne sont venus là que pour se battre. Un ramassis de militants d'extrême droit, d'extrême gauche et de jeunes de banlieues en mal d'adrénaline depuis novembre dernier, ont arrosés les forces de l'ordre de chaises, tables, poubelles, barrières vauban, pavés durant toute la soirée, avant de mettre le feu à des voitures et à la librairie PUF, ainsi qu'aux kiosques à journaux. Heureusement la police a fini par recevoir l'autorisation de charger, et a procédé à 187 interpellations qui, on ne peut que l'espérer, donneront lieu à des punitions exemplaires.

La France ne sort une nouvelle fois pas grandie de ces événements. Nous donnons de nouveau, à peine 4 mois après le soulèvement des banlieues, une bien piètre image de notre pays à nos voisins européens et au reste du monde.

La société française se radicalise de plus en plus. D'un côté une France qui prône l'immobilisme et le statut quo ; de l'autre celle qui veut avancer, travailler et progresser. Nous nous trouvons face à un véritable choix de société. De nombreuses questions se posent à nous.

La gauche a un rôle non négligeable à jouer. Elle doit désormais adopter une attitude constructive et raisonnable, regarder ce qui se passe ailleurs, chez ses alliés de la gauche européenne, et notamment allemande, dont elle se dit être la plus proche. Cette dernière vient tout juste de cautionner un projet de loi qui est le frère jumeau du CPE français. Elle n'a rien à gagner à pousser les gens dans la rue. Cette gauche qui soit n'a pas de projet pour le pays tout en rêvant de revenir au pouvoir l'an prochain, soit n'a aucune vocation à gouverner et ne trouve sa raison d'être que dans la contestation sans jamais rien proposer, doit aujourd'hui, si elle est responsable, faire preuve de bonne foi. Elle doit arrêter d'encourager le blocus des universités, comme le fait Bertrand Delanoë par pur principe d'opposition au gouvernement.

Quant au gouvernement, il doit enfin faire preuve de courage politique et maintenir cette loi et la faire respecter. Ce n'est pas la rue qui gouverne, ce sont les urnes, et par voie de conséquence le parlement. La droite française a trop souvent baissé les bras par le passé (Balladur, Jupé dans les années les plus récentes). Il faut aujourd'hui maintenir le cap des réformes difficiles mais ô combien nécessaires. Le gouvernement Raffarin avait tenu le coup sur les retraites, celui de Villepin doit tenir sur le CPE et ce qui lui reste à accomplir durant l'année qui vient. Ce n'est qu'à ce prix que la France pourra reprendre le chemin de la croissance. Thatcher a montré le chemin en Angleterre en 1979, il faut faire pareil ici, et ne pas céder, il en coûterait à l'UMP la victoire en 2007, ce qui serait une véritable catastrophe pour la France.

Personne n'a à y gagner dans cette affaire, et il est bon de rappeler que la gauche n'a jamais profité de telles manipulation, les jeunes n'étant plus ancrés à gauche comme par le passé... Les moins de 24 ans votant même plus volontiers FN que PS.

Damien
Puis :
Je tiens à ajouter un élément que j'ai oublié de mentionner sur l'hypocrisie et la mauvaise foi de la gauche: Les régions présidées par celle-ci prennent tour à tour la décision de ne pas accorder de subventions aux entreprises ayant recours au CPE... Encore un bel exemple de mauvaise foi, pour mettre des bâtons dans les roues de la droite. On apréciera la loyauté et l'honneteté intellectuelle d'une telle mesure...
Aussi, je tiens à préciser que je ne suis pas "pour�? le CPE, mais pour le travail plutôt que pour le chômage! Je préfère avoir 5% de chômage comme en Angleterre avec des bas salaires, plutôt que 10% d'assistés comme en France. Le travail est socialisateur. Certes l'Angleterre ne propose pas à tous des salaires astronomiques, mais elle offre l'intégration par le travail au plus grand nombre possible. Donc en attendant mieux, en attendant le retour de la croissance, je dis oui au CPE!
Julien

Post by Julien »

Hm... Beaucoup de chose à répondre, car je suis en grand désaccord avec toi... La tentation serait grande d'argumenter point par point, mais par manque de temps (il va falloir que j'aille manifester -) ), je vais me contenter de quelques arguments d'ordre général...
Il est plutot intéressant de remarquer que le genre de phrase telle que "ce n'est pas la rue qui gouverne" donne beaucoup d'indications quant à la doctrine politique de celui qui la prononce, et semble montrer qu'il est plus intime avec la pensée de Mr Raffarin qu'avec les écrits de Rousseau. Outre qu'une telle affirmation mette clairement au jour les fondements idéologiques qui la sous-tendent, elle dénote de plus d'un certain mépris pour la rue (que d'aucun nomme "la france d'en bas"... Mépris, encore...). On aurait pourtant tort de mettre le soulèvement populaire sur le compte d'une simple incompréhension , sur la bêtise de la masse (étudiante, salariale etc...), ou encore sur le compte d'une manipulation syndicale, explications, encore une fois, par trop teintées de condescendance, et qui en disent là aussi beaucoup sur la position socio-économique (et psychologique, serais-je tenté d'ajouter) de celui qui les profère. Il y a, dans la "masse" -puisqu'il faut l'appeler ainsi-, une finesse d'analyse en ce qui concerne les questions politiques, et les réactions qu'elles engendrent sont à prendre comme signe de cette finesse.
Si une telle mobilisation a lieu, c'est parce que le CPE est ressenti comme illégitime, et je réduirais toutes les raisons invoqués en sa défaveur en une seule : il est une abberation quant à la logique contractuelle même. Par lui, les employeurs obtiennent le droit théorique de licencier sans aucune justification, et de soumettre l'employé à une menace permanente (dire que l'on peut, sous son régime, demander à se voir accorder un prêt, un appartement etc etc, me fait doucement rigoler, qui osera en demander un sachant que, pendant deux ans, il peut être licencié du jour au lendemain -un mois de préavis, merci du privilège!). Le rapport de force est ainsi totalement en faveur de l'employeur. Il y a là une atteinte fondamentale à la notion même de contrat, ici, l'un des contractants peut mettre fin, sans contrepartie négociables, à un contrat pourtant posé comme réciproque. L'une des parties ne fait que contracter avec elle-même, ce qui, comme le disait Rousseau, est une absurdité logique.
On pourra me rétorquer que, dans les faits, un licenciement non justifié reste attaquable en droit, mais quel emloyé, dans ces conditions, irait risquer par là toute chance d'embauche future?

Rappelons simplement pour mémoire que dans le cadre du libéralisme, les relations entre individus doivent être ou devenir des relations contractuelles, volontaires et consenties, sur le mode gagnant/gagnant ou donnant/donnant. On se retrouve ici avec un contrat qui accorde à l'employeur, sans justification, le droit d'y mettre fin, on remet par là en question l'idée de consentement mutuel et on rompt avec le concept du donnant/donnant. Cela fait du CPE un non-contrat, une abberation logique. Il est anti-libéral dès lors qu'il accorde un droit sans aucune obligation de respecter le droit de l'autre. Il y a là un mépris (qui n'est pas sans rapport avec celui invoqué plus haut) rigoureusement anti-libéral et despotique.
Que l'on ne me réponde pas par l'argument (sans cesse prétexté par les tenants de cet anti-contrat) selon lequel par définition un employeur se soucie de l'employé, on assisterait pas, dans ce cas là, aux abus des stages et autres CDD que le CPE prétend combattre...
psykotik
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Post by psykotik »

Bien, à mon tour de mettre mon grain de sel.

A mon grand étonnement, je suis plutôt du côté de Damien, bien que pour des motifs certainement radicalement différents. Il faut dire que je ressens, tout comme Julien, un certain mépris d'une grande partie de la droite pour toute cette agitation sociale. Qui n'est pas sans rappeler (métaphore mainte fois utilisée, mais que je crois ici très pertinente) Louis XVI (remplacez le numéro correct si je me trompe) ne comprenant pas pourquoi le peuple tape contre la porte d'entrée demandant à manger.

Au mois d'octobre, des simples d'esprit français mais surtout étasuniens voulaient voir dans les émeutes des banlieues une guerre de religion, le résultat des postes avancés islamiques en France, qui passeraient à l'action contre les bons chrétiens. On sait très bien ce qu'il en était : malaise social, manque d'ambition du politique, manque de débouché, sentiment d'être méprisé par des citadins (qu'ils n'étaient plus) et des dirigeants. Que ce sentiment soit justifié ou non, je m'en " bats la race " ; ce sentiment n'est pas simulé, et c'est avec une arrogance incroyable qu'on a tué dans l'oeuf les revendications. Pardon, il est vrai qu'un service civil a été instauré. Bref, à mon sens, c'était la démonstration que les gouvernants français – toutes choses étant égales par ailleurs - étaient au moins autant en phase avec leur population que dans les années précédents la révolution française, ou qu'en Mai 68. Sans vouloir juger de l'importance des revendications de ces différentes époques.

Aujourd'hui, c'est le même cinéma : 1,5 millions de personnes - selon les syndicats, 1000 selon la police – descendent dans la rue, et les conservateurs s'offusquent : mais comment osent-ils, alors qu'on se décarcasse pour cette plèbe... oubliant que c'est la plèbe qui les as mis au pouvoir, espérant les voir résoudre leurs problèmes. Le réflexe aristocratique n'est pas mort en 1789, loin s'en faut. Il faut croire que pour toi, Damien, tous ces gens ne sortent dans la rue que pour leur bon plaisir. A aucun moment dans ton texte je ne vois de nuance, de remise en question, de doute qui pourrait m'amener à penser que tu te demandes pourquoi font-ils ça. Non, ils ont tort par défaut, coupable de ne pas accepter ce que les élites ont décidées.
La France ne sort une nouvelle fois pas grandie de ces événements. Nous donnons de nouveau, à peine 4 mois après le soulèvement des banlieues, une bien piètre image de notre pays à nos voisins européens et au reste du monde.
Tu résumes en deux phrases le fossé qui nous sépare. L'image on s'en fout, la politique c'est réussir à travailler en amont pour ne pas avoir de manifestations. Les avoir, c'est avoir échoué. C'est tout d'abord réformer un système politique insuffisamment démocratique, qui permettrait des consultations avec les partenaires sociaux, économiques, etc. Le système démocratique français était peut-être autrefois un exemple, aujourd'hui il est totalement inadapté. Et dans un second temps, c'est essayer d'expliquer à sa population pourquoi on veut faire certaines actions ; mais il est essentiel que la première étape ait été accomplie.

Maintenant, il y a lieu de relativiser aussi les manifestations. Je me méfie comme du diable des foules, dont la somme est moindre que le total de ses éléments (Lebon). Je ne pense pas, Julien, que tu en appellerais à la finesse d'analyse des foules iraniennes. Bref.

Sur le coeur du sujet : je crois que les Français ont de la peine à accepter que le monde change, et que les choix politiques sont à réinventer. Attention, ce qui ne veut pas dire donnons les pleins pouvoirs aux entreprises. Mais réinventons de nouveaux systèmes. Parce que la Suisse, qui n'est pas non plus un pays spécialement anti-social, a un système bien plus souple : le contrat à durée déterminée existe, ainsi que le contrat à durée indéterminée. Dans ce dernier cadre contractuel, le délai de résiliation est au maximum de 3 mois, et ce... après 10 de rapports de travail. Ces conditions sont bien évidemment différentes dans l'administration publique, ou dans les grandes boîtes. Mais c'est le minimum légal. Et personne n'en meure. Et, alors que ce pays a vu Rousseau naître, il ne voit aucune atteinte à la notion de contrat. Car ce que tu oublies, Julien, c'est qu'un salarié peut avoir envie de mettre fin aux rapports... Relation unilatérale : je peine à comprendre la mentalité qui agite le peuple français, qui voudrait que l'entreprise soit si paternaliste ; la gauche a tellement dénoncé ce type de comportement entrepreneurial, durant le XXe siècle...

Je comprends que la peur de précarisation habite les manifestants. Mais sincèrement, je ne vois pas en quoi ce CPE détruirait un modèle social français. Je combats avec force tout ce qui pourrait créer des working poors en France, mais je ne vois pas en quoi le risque est patent avec ce contrat. Qui à mon avis, ne créera pas un seul emploi, mais j'en parlerai p'têtre une autre fois.

Et franchement, Damien, dire que Thatcher a montré la voie, c'est ne jamais avoir ouvert un bouquin de sociologie qui, à renfort de statistiques et non d'impressions à deux balles, te montrerait quels sont les résultats de la précarisation. Toi qui débecte le système US, c'est exactement ce que tu veux importer chez toi.
il faut faire pareil ici, et ne pas céder, il en coûterait à l'UMP la victoire en 2007, ce qui serait une véritable catastrophe pour la France.
Sûr, la victoire de l'UMP en 2002 a été une telle chance pour la France, qu'il serait triste et incompréhensible de ne pas faire confiance à quelqu'un d'autre. Enfin, après tout, si ce n'est pas un UMP, il suffira de dire que c'était un tas de cons qui ont mal voté, et de lâcher les CRS pour remettre un peu d'ordre. roll
Julien

Post by Julien »

Je reconnais bien ta finesse d'analyse, mon cher psykotik (j'aime beaucoup commencer par ce genre de formule de politesse, comme on peut en entendre durant les colloques universitaires. Dans la plupart de ceux auxquels j'ai pu assister -pour les colloques de philo en tous les cas-, régnait une espèce d'extrême courtoisie, un savoir-vivre affable que j'aimerais reproduire ici D ). Toutefois :

* Pour préciser ma remarque sur la finesse d'analyse du groupe, je n'entendais par là pas tant la foule de gens qui manifestent qu'une forme d'"opinion publique", extrêment réactive en ce qui concerne l'illégitimité de certaines lois ; c'est une opinion, dans une démocratie, qu'il est nécessaire d'écouter lorsqu'elle se manifeste. Il faut analyser les causes de ces manifestations, et les considérer pour ainsi dire au "1er degré", et non pas comme un psychanalyste trouve les causes cachées d'un trouble, ou comme l'on mettrait ce refus sur le dos d'un prétendu immobilisme (enseignant, syndical, etc etc) des esprits en France, car dans les deux cas il ne s'agit pas d'une écoute sincère et franche (à proprement parler, le psychanalyste n'"écoute" pas son patient, mais lit -ou pense lire- des causes par delà les explications de ce dernier). Si je me permets ce parallele, c'est que cette attitude me semble être celle de la droite dans le cadre des réactions face au CPE (et celle de Damien ici), et je crois que cette toute confiance en son propre jugement, ce dédain légèrement condescendant est clairement ressenti par ceux qui en font l'objet, et accentue le sentiment d'illégitimité déja grand...

* Ensuite, pour revenir sur l'unilatéralité dans la relation employeur/employé : est-il besoin d'insister sur le fait qu'entre ces deux agents, le rapport de force est par définition en faveur de l'employeur? Que des gardes-fous légaux sont nécessaires afin de limiter le pouvoir de celui qui emploie sur celui qui vend sa force de travail? Il ne s'agit pas de demander à l'entreprise d'être paternaliste, mais de faire en sorte que les contrats qui la lient aux travailleurs donnent une équivalence de droits et de devoirs à l'un comme à l'autre. Il est évident que si l'on donne à celui qui possède a priori le pouvoir les possibilités légales de l'utiliser à sa convenance, sans contreparties, celui-ci va l'utiliser à son avantage. S'il y a un agent à protéger, ce n'est certainement pas l'entreprise, mais bien le travailleur, qui n'a aucun intéret à se retrouver dans une situation de laquelle, pendant deux ans, il peut sauter d'un jour à l'autre sans que soit besoin de le justifier...
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Post by psykotik »

Je comprends mieux ce que tu voulais dire sur la foule, je t'ai mal compris. Acceptes mes plus plates excuses, très cher, car mon embarras à la lecture de ta réponse n'a d'égal que ton intelligence hors du commun (je peux venir aussi dans tes réunions secrètes de philo ?) 8)

Plus sérieusement : je comprends cette peur. D'autant que cette peur reflète l'hypocrisie du discours de défense du CPE, que je n'ai pas soulevé : si on ne veut qu'un contrat prévu en cas de coup durs conjoncturels pour une boîte, eh bien on en fait un. Là, on peut licencier sans motifs; pourquoi ? Pourquoi permettre le licenciement sans justification, si le seul but est de permettre aux PME de démarrer ?

Ce qui ne m'enlève toutefois pas de la tronche que 6 mois de préavis, c'est trop. Et qu'il y a de très bons arguments pour croire qu'après 1 an, 1 an et demi, une boîte ne va pas licencier sans raison. Un boîte ne licencie jamais sans raison, elle ne le fait que si il n'est plus rentable de garder son salarié. Si le salarié ramène de l'argent, à moins que les RH de la boîte aient une dent contre leur patron, le salarié restera en place.

La France ne manque pas d'argent, elle a la plus haute productivité au monde (peut-être n'est-elle plus première, depuis l'année dernière, remarque), et elle a des compétences hors classe. Alors quand je vois comment ce contrat, à l'impact somme toute assez limité (destiné aux moins de 26 ans), lance les foules sur les pavés... Je ne peux m'empêcher de me souvenir des mots de Chirac avant les votations sur le TECE, traduisant une incompréhension : "Ce qui me frappe le plus, c'est à quel point vous n'avez plus confiance en vous". Bis repetita en novembre, tris repetita maintenant. Je ne dis pas ça pour faire un effet de manchette, mais quand je vois le climat français actuel, je vois se rapprocher les élections 2007 avec une grande crainte pour la sécurité de sa population... ?
Damien

Post by Damien »

Malheureusement ma réponse sera brève, car à mon grand damn je fais parti de cette France qui travaille et qui donc n'a pas toujours le temps de faire ce qui lui plait.
Je ne me livrerai pas non plus à une quelconque formule de politesse à votre égard (sans doute la condescendance de droite qui me caractérise).
Tout d'abord, mon cher Julien, je le dis et le répète, et l'assume même, ce n'est pas la rue qui gouverne. Que tu le veuilles ou non, ce sont les urnes, et par vois de conséquence, le parlement. Ce dernier a voté en toute légalité une loi, qui doit donc être appliquée, un point c'est tout, il n'y a là pas matière à débat. Dans le même registre, J-C, tu dis que les gens qui manifestent ont mis ce gouvernement au pouvoir. Je ne pense pas que ce soit le cas... Ces braves gens n'ont pas mis l'UMP au pouvoir, ces gens ont pour une très très large majorité, pour ne pas dire unanimité, voté pour la gauche et l'extrême gauche, puis, par défaut, car leurs candidats ont lamentablement perdus, en raison de leur médiocre bilan, au premier tour des élections de 2002, pour Chirac. Ces gens contesteront toujours, et par pur principe, les mesures que prendront un gouvernement de droite.
Ensuite, tu nous dit que le CPE est illégitime et défie toute logique contractuelle. Tout d'abord, en tant qu'avocat, je me dois de te dire (et peut être de t'apprendre) qu'un contrat peut être unilatéral. Mon ami Jean-Claude (qui le reste bien entendu malgré ses avis qui sortent parfois du droit chemin ) ) te démontre à juste titre qu'un CDI peut donner lieu à une révocation unilatérale de la part d'un salarié, et ce, sans aucune contre-partie pour l'entreprise... Tu nous dit aussi que c'est le salarié qu'il faut protéger, car l'employeur est toujours en position de force. Pourrais-tu dans ce cas m'expliquer comment je réussis à négocier mon salaire à la hausse par rapport à ce qu'on me propose en stage!!?? Je te rappelle aussi, qu'il est possible de virer sans raison aucune un salarié bénéficiant d'un CDI... Le licenciement est, Dieu merci, libre en France, jusqu'à preuve du contraire. Ce n'est que le montant de l'indemnité qui change. Le CPE prévoit, je le répète, puisque tu ne sembles pas l'avoir noté, une indemnité en cas de termination avant la fin de la période de deux ans. Il reste, que tu le veuilles ou non, économiquement et socialement bien meilleur que tout ce qui existe aujourd'hui pour les jeunes (j'en profite aussi pour te rappeler que ce gouvernement a rendu obligatoire la rémunération des stages de plus de trois mois, donc on ne dira pas qu'il ne fait rien pour les jeunes). Il faudrait aussi que tu ailles faire un petit tour en Europe, voir ce qui s'y passe et s'y fait. Tu remarqueras que partout, je dis bien partout, le licenciement est bien plus simple que chez nous. Et ce, sans que personne ne s'en plaigne comme ici. Les résultats sont aussi là, le chômage y est partout plus faible.
encore une fois, mais j'ai l'impression qu'il faut se répéter, le CPE n'est pas la solution miracle, il est un essai, on verra dans 6 mois. Il y a déjà eu plus de 350 000 CNE de signés, un succès pour le moment, donc il faut laisser sa chance au CPE. La meilleure solution, serait de baisser les charges sociales sur les bas salaires, cela contribuerait encore plus à la création d'emplois en France. Je travaille actuellement dans un bar entre mes semaines de cours, et je touche 8 euros de l'heure, en fait seulement 6 une fois que l'Etat s'est servi, soit 25% de mon salaire, c'est tout à fait scandaleux... J'en remercie la gauche, car c'est grâce à elle que nous en sommes arrivés là.

Non, la vérité sur ce qui se passe en ce moment, c'est qu'il y a une minorité de gens qui n'ont rien d'autre à faire que de descendre dans la rue par principe, et pour réclamer tout et n'importe quoi. Une bande de jean foutres. Quand il s'agit de marcher ils répondent présents, mais quand il faut aller à l'ANPE chercher du travail de façon active, on ne trouve plus personne... Et du travail il y en a, j'en ai trouvé très facilement.
J-C, une dernière chose, bien sûr qu'on ne se fiche pas de l'image du pays! C'est vital! La France est passé sur CNN hier dans la rubrique des "pays en guerre" pour la seconde fois en moins de 6 mois. Même si bien entendu c'est exagéré, cela a un impact très négatif pour notre économie et les investissements étrangers chez nous. Quand l'Angleterre recommande à ses citoyens de ne pas se rendre en WE à Paris, cela a aussi un impact. Quand les journaux Britanniques parlent de la France comme le pays de "la violence continuelle", c'est très mauvais. Quand le reste de l'Europe nous décrit comme le pays du "NON éternel à tout", ça a un effet dévastateur.
Il y aurait tant d'autres choses à dire, mais le temps me manque. Notamment sur Thatcher... Tu es bien le seul à ne pas reconnaître le grand bien qu'elle a fait à l'Angleterre, la remettant sur la voie du succès et de la croissance, en faisant ainsi la troisième puissance mondiale, et première européenne aujourd'hui... Les fondements, c'est elle, même les socialistes anglais l'ont reconnus, et lui ont rendus hommage là dessus, reconnaissant qu'ils avaient, eux, torts à l'époque.
Enfin, comme dernière lecture, je vous recommande un excellent article paru dans Libération aujourd'hui, et qui met en lumière toute la bêtise de ce mouvement, qui revendique n'importe quoi, sous prétexte du CPE, avec le but réel avoué des leaders de gauche qui en tire les ficelles de "faire tomber le gouvernement" (c.f., Libération). Une fois n'est pas coutume, j'ai pris plaisir à lire ce quotidien que je ne feuillete d'habitude jamais!
Damien

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Et oui, J-C, tu as raison malheureusement... On va tout droit vers un bis repetita de 2002 en 2007 si ça continue et si le gouvernement cède sur le CPE. Il y en a un au moins qui se frotte les mains de la tournure que prennent les évènnements, et ce n'est pas forcément le bon...
Julien

Post by Julien »

"Tout d'abord, mon cher Julien, je le dis et le répète, et l'assume même, ce n'est pas la rue qui gouverne. Que tu le veuilles ou non, ce sont les urnes, et par vois de conséquence, le parlement. Ce dernier a voté en toute légalité une loi, qui doit donc être appliquée, un point c'est tout, il n'y a là pas matière à débat. "

Bien, je vais donc me répéter également et préciser ma position. Je n'ai jamais contesté le fait que ce soient les urnes qui gouvernent, je n'ai pas non plus affirmé que l'assertion " ce n'est pas la rue qui gouverne " était fausse, j'ai simplement souligné que ce genre de discours utilisé à titre d'argument identifiait clairement celui qui le prononçait et la position socio-économique qu'il occupait, à savoir une position de domination. Point.
Ensuite, en ce qui concerne la dernière phrase que j'ai quoté ici, tu m'excuseras, mais il y a précisément là matière à débat. Inutile de rappeler la différence entre légalité et légitimité, ni de préciser que le droit ne se justifie pas par le fait. Que la loi ait été votée -et imposée par le 49-3, de quelque manière abusive qu'on juge les raisons pour lesquelles il a été utilisé- n'exclue pas d'emblée sa possible illégitimité. Si cette possibilité s'avérait exacte, la contestation, et pourquoi pas l'annulation d'une telle loi, serait tout à fait justifiée. Qu'une loi ait été votée légalement ne prouve a priori rien quant à sa légitimité (au passage, je ne parle pas de l'illégitimité dans laquelle a pu être voté ce texte, comme semble le croire Julie, mais de l'illégitimité du texte lui-même, que les choses soient bien claires).
De plus, et pour répondre là aussi à Julie, et éviter par là d'être taxé de démagogie, je répète ce que je disais dans mon second message : je n'affirme pas que la démocratie consiste à ne prendre en compte qu'une minorité de révoltés, je dis que considérer de telles réactions comme portées uniquement (ou en grande partie) par des " casseurs et des parasites [...], des chauvins passant aux yeux du monde pour des cons " est signe d'une parfaite étroiture d'esprit, et dénote d'une méconnaissance des nombreux débats qui ont lieu (dans les universités, les associations etc...), de la même manière que prendre les gens qui manifestent pour des imbéciles qui n'ont rien compris à rien et que c'est pour cette raison qu'ils manifestent relève clairement du dédain. Tu inverses mon discours –et ici, l'ordre du réel- en disant que c'est ce genre de prétendus comportements (" casseurs, parasites " chez toi, et autres " Jean foutres " chez notre camarade Damien, j'espère avoir l'occasion de revenir sur ce charmant terme) qui amènent à la condescendance, alors que précisément c'est une forme d'arrogance qui motive les manifestations, dans lesquelles les casseurs et autres parasites sont bien minoritaires. Arrogance à l'oeuvre à la fois dans le texte de loi et dans la posture de ceux qui la dictent et dans les mots de Damien, dans lesquels on en trouve la prétentieuse tonalité.

Ensuite, en ce qui concerne le CPE en lui-même : je répète ce que je disais plus haut, la question est à considérer du point de vue du rapport de force, à savoir que celui-ci est d'emblée dans les mains de l'employeur, et que sans protection, l'employé est promis à devenir un esclave légal, c'est pour cela qu'existe le droit du travail. Aussi, comment est-il possible de faire valoir ce droit du travail dans un rapport de force ou l'employé peut-être renvoyé chez lui sans qu'il soit besoin de le justifier et –en conséquence- sans qu'il soit possible pour lui de réfuter les motifs de licenciement ? Accorder aux entreprises le droit de licencier sans motif ne peut que modifier en profondeur les rapports sociaux, chose certes très profitable pour les partisans de ce contrat adoubé par le MEDEF, mais assez peu pour le salarié dont les droits sont réduits à une peau de chagrin. Tout est en effet question du lieu social et économique à partir duquel on parle... Tout le monde n'occupe pas le même... Pour finir sur le CPE, j'aimerais en outre (et entre autres choses) opposer aux belles innovations que selon vous il présente, le § 3, qui affirme en substance la possibilité pour le patron de multiplier les CPE avec un même jeune. Si le but du CPE est tel qu'il est présenté, c'est-à-dire permettre à terme d'accéder à un CDI, pourquoi ouvrir ce champ d'exploitation au patronat, alors même que la loi sanctionne le recours répété aux CDD (et à l'intérim) dans le cas d'une place occupée de manière constante ? J'y vois là encore une atteinte aux droits du travail...

De plus, que " le statut de " contrat " au sens juridique ne prête même pas lieu à discussion " m'est égal à un point que tu ne peux pas imaginer, c'est moi qui suis désolé de te le dire Julie, mon propos n'est pas d'en donner une définition juridique, c'est-à-dire légale, mais bien plutôt une définition, enracinée dans nombre de pensées antérieures (mortes pour toi, bien vivantes pour moi, là réside sûrement une partie de notre désaccord), que j'estime légitime.
" Le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître s'il ne transforme sa force en droit et l'obéissance en devoir ", me permettrais-je de citer, même si la référence rousseauiste paraît surannée à certain(e)s, et que, paraît-il, la philosophie a ses limites par rapport à la pratique... Je serais d'ailleurs assez curieux d'entendre une définition de ce qui est pratique et de ce qui ne l'est pas (je n'aurais pas la prétention de renvoyer à " Théorie et Pratique " de Kant, dont le sujet est précisément celui-ci que tu traites avec une si sûre désinvolture) ... Je ne m'étendrai pas sur la référence à Thatcher non plus, car à ce point il est évident que nos conceptions politiques (et plus loin, certainement) diffèrent radicalement...

Enfin, dernière petite remarque à l'attention de la prose de Damien : plus encore que le fond de ton texte, c'en est la forme et le style qui me font mal aux yeux... Si tu fais partie de la France qui travaille, c'est qu'il y a donc une France qui ne travaille pas... Je cherche à comprendre, pourquoi cette autre France ne travaille-t-elle pas ? Je poursuis ton texte... Ha oui, ça y est, j'ai compris, tu me donnes plus bas " la vérité sur ce qui se passe en ce moment " : c'est qu'il y a une minorité de gens qui demandent n'importe quoi, à torts et à travers, regardez moi ces imbéciles qui ne savent ce qu'ils font, haaa tous ces jeunes qui ne pensent qu'à s'amuser, haaa les feignants ! qui empêchent le grand soir néo-libéral d'avoir lieu, quand il s'agit de se plaindre, il l'ouvrent, mais dès qu'il s'agit d'aller au charbon, il n'y a plus personne... C'est donc pour ça, si on a des manifestations, des banlieues qui craquent, c'est donc parce qu'il y a des jean-foutres (traiter les gens d'une bande de Jean foutres, est-ce bien raisonnable, à ton âge ?), des racailles, et des " habitudes de chauvins "... Quels imbéciles ces français en masse, quelle intelligence que celle du MEDEF/UMP qui leur apporte des solutions que eux ne savent pas accepter avec reconnaissance... !

Toi qui m'apprends qu'un contrat unilatéral peut avoir lieu, alors que mon propos n'était pas juridique, laisse moi te parler –et peut-être t'apprendre l'existence- d'un texte d'Aragon, qui se nomme " Les Aventures de Jean Foutre La Bite ", bizarrement ce texte est dirigé contre une forme de bien-pensance, vers les garants de certaines valeurs pour qui la poésie (entre autre) reste une affaire de fumistes. Il est dirigé contre ceux qui, comme toi, utilisent le terme de " jean-foutre ", et il y a une continuité langagière et sémantique dans le discours qui est le votre, que je pointe depuis mon premier commentaire, qui est loin d'être sans rapport avec le fond de ton écrit, et qui est peut-être le reliquat le plus prégnant de l'idéologie dominante dont tu te fais complice ... Si j'invite Julie à lire (ou relire) Théorie et Pratique, peut-être te serait-il bénéfique Damien de jeter un oeil à cet écrit, qui sait ?
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Post by psykotik »

J'ai trois préoccupations dans cette discussion :
1/ Qu'elle ne dégénère en pugilat politique. Souci infondé pour l'instant, même si notre amis CRS m'a fait un peu peur dans ses premières lignes. Et je dois avouer en réalité que je n'ai rien contre un bon coup de sang parfois.
2/ De plus grande importance que le premier, c'est que les intervenants se répondent, qu'il y ait une discussion. Il n'y a pas de public comme à la télé, alors j'aimerais que chacun suivent les règles élémentaires du dialogue, qui voudrait que l'on n'évacue pas des problèmes précédemment posés.
3/ Lorsque vous entrez dans une maison bien tenue, vous vous essuyez les pieds sur le paillasson. Ici, vous laissez votre rhétorique idéologique à deux balles à l'entrée, devant le blog. Dire "c'est la gauche qui est responsable de ci", "c'est la droite qui ne comprend rien" ne sera accepté que comme conclusion d'une démonstration argumentée. Ce n'est pas une tribune politique, voir point 2.
Tout d'abord, mon cher Julien, je le dis et le répète, et l'assume même, ce n'est pas la rue qui gouverne.
J'aimerais que tu me répondes sur la nécessité de réformer le système politique français pour lui apporter plus démocratie, et sur l'échec que représente une manifestation de cette ampleur pour un gouvernement. J'aimerais que tu m'expliques si tu trouves normal qu'autant de gens soient dans la rue, si tu crois qu'1 million et demi d'individus dans la rue ne sont que "manipulés". Des cons, des casseurs, il y en a dans la foule (ce que libération semble avoir découvert) autant que dans un lycée, dans une entreprise, dans un parlement. Réponds-moi précisément sur ce point, car c'est le reproche majeur fait aujourd'hui à la droite : en décalage avec les réalités sociétales, dont les solutions (instauration d'un service civil) fûrent un emplâtre sur une jambe en bois. Hier les racailles des banlieues, aujourd'hui les étudiants et les quelques syndiqués, est-ce qu'il n'y a aucune réflexion à avoir ? Hormis un "ce n'est pas la rue qui gouverne" ?

J'aimerais aussi que tu répondes sur pourquoi dans le CPE on ne demande pas de justification lors d'un licenciement. Encore une fois, l'argument phare étant la possibilité de licencier pour une activité qui démarre, ou qui est incertaine, justifie uniquement un contrat de licenciement économique. Pourquoi ne pas vouloir de justification ? Je n'ai rien lu à ce sujet... et me demande comment on le défend.

Cela dit, si je pense que ce contrat est un mauvais contrat, qu'il ne créera pas d'emplois de manière durable (car c'est l'objectif, la France n'aura JAMAIS une réactivité comme celle des USA, pouvant absorber des chocs conjoncturels en acceptant que des millions de personnes vivent dans des conditions d'insalubrité avancée dans l'indifférence nationale presque totale), je reste persuadé que les réactions sont hors de proportion pour une mesure somme toute assez timide.
Dans le même registre, J-C, tu dis que les gens qui manifestent ont mis ce gouvernement au pouvoir. Je ne pense pas que ce soit le cas... Ces braves gens n'ont pas mis l'UMP au pouvoir, ces gens ont pour une très très large majorité, pour ne pas dire unanimité, voté pour la gauche et l'extrême gauche, puis, par défaut, car leurs candidats ont lamentablement perdus, en raison de leur médiocre bilan, au premier tour des élections de 2002, pour Chirac.
Bon, ça mon copain, tu évites. Ce genre de phrase creuse et idéologique, je n'en veux pas. Le premier tour s'est joué à quelque pourcents près, en cumul les candidats de gauche avait autant que ceux de droite, donc c'est typiquement le genre de petites phrases assassine qui a sa place dans un débat où personne n'écoute son interlocuteur, mais pas ici. Chirac a été élu à 82%, point barre. Histoire de te rafraîchir la mémoire.
La meilleure solution, serait de baisser les charges sociales sur les bas salaires, cela contribuerait encore plus à la création d'emplois en France. Je travaille actuellement dans un bar entre mes semaines de cours, et je touche 8 euros de l'heure, en fait seulement 6 une fois que l'Etat s'est servi, soit 25% de mon salaire, c'est tout à fait scandaleux... J'en remercie la gauche, car c'est grâce à elle que nous en sommes arrivés là.
J'aimerais comprendre : est-ce que le but aujourd'hui pour les pays industrialisés est vraiment de garder les secteurs industriels ? Est-ce qu'on doit suivre les pays qui n'ont presque pas de charges salariales sur ce terrain, ou au contraire rebondir et créer des nouveaux emplois, former les gens à autre chose, aider les créateurs d'entreprises ? Non, parce que faire de la concurrence dans les charges salariales, c'est tenter désespérément de revenir à une époque révolue, celle du temps où un salarié était suffisant pour un retraité, où l'industrie européenne se portait bien, etc. Le monde à changé, n'en déplaise au thatchériens )
Et du travail il y en a, j'en ai trouvé très facilement.
Damien, je te trouve... bordel, t'as pas de famille, tu vis chez tes parents, tu peux te contenter d'un boulot à 8€ de l'heure... A te lire, je réalise à quel point tu es décalé de certaines réalités. Je ne veux absolument pas être condescendant, jouer d'un paternaliste "si tu savais ce que j'ai vécu", car ce serait faux, et trop facile.

N'empêche qu'au vu de certains arguments, et de celui-ci en particulier, que je mets en exergue tant il démontre sur quoi se fonde ta position, je crois que notre discussion a peu de chance d'être productive. En raison de certains points qu'aborde Julien, en raison du milieu dont tu es originaire, en raison de certaines questions que tu n'as jamais eu à te poser. Et j'ai beau tourner mes mots de différentes manières, je n'aime pas le côté donneur de leçons de mes deux paragraphes. Pourtant, tes mots me semble démontrer un total et irréversible décalage avec une réalité touchant une grande partie de la population française. Une réalité qu'il t'es matériellement impossible de comprendre.
J-C, une dernière chose, bien sûr qu'on ne se fiche pas de l'image du pays! C'est vital! La France est passé sur CNN hier dans la rubrique des "pays en guerre" pour la seconde fois en moins de 6 mois. Même si bien entendu c'est exagéré, cela a un impact très négatif pour notre économie et les investissements étrangers chez nous.
Je crois que lorsque Chirac passait sur CNN comme représentant d'un pays de couards, extrémistes, intellos, puants, tu ne t'en offusquais guère. L'économie (si tant est que l'économie en souffre, malgré tout l'anti-américanisme français les échanges n'ont pas souffert d'un iota de la guerre en Irak) se plie à la politique en toute circonstance, et non pas uniquement lorsque cela te sied.
sur Thatcher... Tu es bien le seul à ne pas reconnaître le grand bien qu'elle a fait à l'Angleterre, la remettant sur la voie du succès et de la croissance, en faisant ainsi la troisième puissance mondiale, et première européenne aujourd'hui...
On en parlera une autre fois, on va essayer de se concentrer sur le sujet principal )

Julie :
La France est aujourd'hui un système communiste puriste établi (relire Marx, sauf pour notre philosophe julien).
Désolé, mais si toi tu permets d'écrire des phrases aussi ridicules, je me permettrai pour ma part de ne pas te répondre. Je sais par avance que la discussion est impossible. Comme écrivait Kundera, si un fou m'affirme que je suis un poisson, je ne vais pas me déshabiller pour lui prouver que je n'en suis pas un.
Damien

Post by Damien »

Je viens d'absorber vos deux réponses (Julien et J-C, car ce "CRS" me semble un tentinet extrême).

Julien, en réponse à "ce n'est pas la rue qui gouverne", tu émets l'idée que ce texte n'est pas légitime. Je voudrais comprendre où tu situes le seuil de la légitimité? Quand 500 000 personnes manifestent (vous avez pris le chiffre des manifestants, 1.5 millions, je prend donc celui de la police, ça me paraît de bonne guerre... Je serai prêt, si vous êtes d'accord, à prendre celui des RG qui se situe à 800 000 pour le territoire national dans son ensemble) ça y est, le texte n'est plus légitime? Ou alors parce qu'un sondage CSA-Libération déclare que 70% des français pensent que le CPE n'est pas une bonne mesure, il devient illégitime? C'est une question importante... Car à mon sens, elle remet en cause le fonctionnement de notre démocratie, et la démocratie elle-même. Ma lecture de notre constitution, est que nous élisons des députés et ceux-ci votent les lois de notre pays. Si cette loi est adoptée légalement, elle est aussi légitime, car sinon c'est remettre en cause carrément les élections! Peut-être est ce que tu fais après tout, et c'est ton droit, mais alors ne te dis pas en faveur d'un système démocratique. Je continue par ailleurs de penser, que les manifestants ne représentent pas ce que ressent et pense la majorité du pays. (Ce qui, je te l'accorde, n'est pas une raison pour ne pas écouter et entendre ce qui les tracasse, mais tout en sachant qu'on ne pourra satisfaire tout le monde, et que ces gens sont bien souvent d'éterneles insatisfait dans nos sociétés d'aujourd'hui).

Vous me parlez ensuite tous les deux de la période d'essai de deux ans. Je le concède, c'est peut être un peu long, le Premier Ministre s'est d'ailleurs dit prêt à en parler. Simplement, au passage, et n'en déplaise à Julien, il faut tout de même regarder comment s'applique le droit dans les faits. La justice française a cette remarquable capacité en matière sociale (et fiscale) à ne pas se contenter d'appliquer la loi, mais à l'appliquer jusqu'à dire droit (ce qui pose la question de la séparation des pouvoirs). Cela a pour conséquence que si le CPE est promulgué par Chirac (on l'espère dès vendredi après la décision du Conseil constitutionnel de jeudi), toute la jurisprudence sur la période d'essai s'appliquera, et les employeurs seront dans la très large majorité des cas obligé de motiver leur décision. la rupture d'un CPE pourra même dans certains cas être annulée! Cela rendra le CPE au final presque aussi compliqué qu'un CDI, ce qui malheureusement lui enlèvera beaucoup de sa flexibilité (mais c'est là le problème de la justice interprétative dans ce domaine en France, peut ^^etre est-ce elle qui au final empêche notre marché du travail de trouver toute sa flexibilité, il y a la une réflexion à mener).

J-C, tu poses la très délicate question des emplois industriels dans nos pays aujourd'hui. Il sont à mon avis perdu, et il serait bien d'enfin l'accepter en France. Nous ne sommes plus compétitifs dans ces secteurs. Il convient aujourd'hui de faire accepter à la population que dans bien des domaines d'autres le font mieux et moins cher que nous et qu'il faut désormais se concentrer sur le secteur tertiaire essentiellement. La formation, la création d'entreprises sont vitales, je suis tout à fait d'accord avec toi sur ces points. Mais ça, les français refusent de le voir et surtout de l'accepter. Seulement voilà, les bas salaires ne concernent pas que l'industrie, il concerne aussi tout un tas d'emplois dont nous aurons toujours besoin en France (et que bien souvent les français n'acceptent pas de faire, d'où le recours au travail au noir et au travail des clandestins). Aussi, la flexibilité et la diminution des charges trouvent toute leur place dans un marché du travail essentiellement tertiaire. Quelque soit le secteur, elles sont une barrière réelle.

Enfin l'image du pays. Sache que la France a beaucoup souffert de la loi des 35h qui a eu un réel impact sur l'investissement étranger en France. Elles sont la raison première invoquée par les américains quand on leur demande pourquoi ils n'investiraient pas chez nous, par exemple. Ce qui se passe dans un pays à un impact. Si Paris connaît une baisse de la fréquentation tourisitique en ce moment c'est bien parce que le monde entier, et l'Europe en particulier diffuse des images de Paris en flamme à la fin des manifestations, que la presse étrangère montre le quartier latin bouclé par les CRS 24h/24 depuis plus de 15 jours... Alors oui, souffrir quand il s'agit de défendre des grands principes et qu'on a raison comme c'était le cas pour l'invasion de l'Irak, mais pas quand il s'agit d'appliquer le droit légal et légitime. Oui au droit de manifester, mais non à celui de tout casser, et à l'occupation des facs qui empêche une très large majorité d'étudiants de suivre leurs cours et de passer leurs exames en juin.

Sur un point plus personnel, J-C, je prend ce que tu dis comme une attaque. Je travaille dans un pub, oui, pour 6 euros de l'heure (soit moins que le SMIC étudiant anglais et deux fois moins que le SMIC horraire anglais tout court, donc on repassera pour le côté totalement anti-social de l'Angleterre). J'y travaille sans broncher, j'ai trouvé facilement. Je travaille avec des gens qui ont fait des études et qui par choix ou non font ça maintenant et en vivent (ce qui n'est pas mon cas, c'est vrai). L'un d'eux est journaliste, mais ne trouve pas, comme toi. Je vois ce que c'est que de vivre avec le SMIC, je vois que c'est dur, mais possible. Je vois aussi qu'ils ne se plaignent pas, même si c'est parfois dur et surtout très fatiguant. Il ne faut pas avoir peur de dire qu'en France il y a des gens (qui ne sont pas aussi peu nombreux qu'on veut bien le croire) qui préfèrent toucher les allocations chômage et autres plutôt que d'aller travailler, et je peux les comprendre, la différence entre le SMIC et ces allocs est minime, donc pourquoi se faire chier à se lever. C'est aussi pour cela qu'il faut baisser les charges, que les bas salaires souffrent moins et que par conséquent le travailleur touche plus et ait réellement envi de bosser. Je travaille par choix personnel, J-C. Parce qu'il n'y a pas de stages à temps partiel en cabinet. Parce que j'estime que ce n'est pas à mes parents de me payer mes sorties, ni mes WE. Que j'ai l'âge pour m'assumer, et qu'au lieu de passer trois semaines à glander et à voir des expos, aller au ciné toute la journée, je peux gagner un peu d'argent. Alors oui, j'ai été élevé dans un milieu favorisé, c'est vrai, mais ce n'est pas pour autant que mes parents nem'ont pas inculqué certaines valeurs, ni celle de l'argent.

Il est bon aussi de rappeler que la gauche avait touché le fond de la précarité avec les emplois jeunes: Un contrat d'un an, renouvelable 5 fois, ne donnant droit ni à une indemnité chômage ni à une formation, et dont le financement n'était même pas assuré. Soit bien pire que le CPE. Mais à cette époque là, bien sûr, il n'y avait personne pour descendre dans la rue... Ce qui montre bien qu'il y a beaucoup de parti pris et une absence latente d'honneteté derrière tout ça. La gauche refuse toute réforme du pays, allant même jusqu'à évincer Claude Allègre lorsqu'il avait voulu toucher, de façon tout à fait opportune, à l'enseignement supérieur. Il est également intéressant de noter que Martine Aubry avait instauré les 35h sans concertation aucune (ce qui est un reproche fait aujourd'hui au gouvernement), ce qui a rompu le dialogue social dans ce pays pendant de très longs mois, voire des années.

Espérons enfin que les manifestations de demain se déroulent dans le calme. Que les apprentis soixante-huitards retrouvent la raison. Car oui, il y a un malaise en France, il vient du fait que les jeunes savent que leur avenir déchantera... Pour citer Barroso: "Tout le monde sait que l'on vivra avec moins de garanties, moins d'acquis, moins de bonheur que les générations précédentes", acceptons le enfin, comme l'ont fait nos voisins, en attendant des périodes meilleures.
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Post by psykotik »

Sur la réponse à Julien, je relèverai juste le "ces gens sont bien souvent d'éterneles insatisfait dans nos sociétés d'aujourd'hui", histoire de continuer à démontrer que tu ne comprends PAS ce qu'il se passe en France. Que tu ne vois pas le lien entre les manifestations sociales des banlieues de novembre, et celle d'aujourd'hui. Qu'il ne s'agit pas de se battre contre la privatisation de la CGN, ou que sais-je. Que ces "éternels insatisfaits" ont peur de l'avenir, un avenir dans lequel ils ne se retrouvent pas. Qu'une société aux clivages économiques et sociaux de plus en plus marquée ne leur convient pas. Pour les étudiants de la Sorbonne, ta cécité serait le résultat de ton appartenance à une classe dominante. Ce serait oublier d'où vient Marx... ce qui ne m'aide pas à comprendre pourquoi tu refuses d'écrire, noir sur blanc : "je comprends ces manifs. Je comprends les soucis exprimés. Non, le projet de société proposé aujourd'hui ne convient plus à la jeunesse". Que tu penses que le CPE puisse améliorer la situation économique de la France, je ne te le discute pas. Je trouve moi-même le marché du travail un peu trop rigide, ce qui remarque, n'a jamais prétérité le pays à la plus haute productivité au monde. Passons ; non, ce qui continue de m'étonner, c'est le dédain que tu t'obstines à éprouver pour les manifestations populaires.

Ensuite, sur la motivation du licenciement (qui d'ailleurs n'existe pas en Suisse), je comprends. Mais pourquoi dois-je l'apprendre sur un blog ? Villepin a-t-il fait un effort didactique, l'a-t-il expliqué aux partenaires ? Je ne parle pas de maintenant, où chaque camp s'est retranché dans un jusqu'au-boutisme incontrôlable, mais encore une fois, en *amont* ? Car tu ne me réponds pas sur les problèmes de communications récurrents. Si le marché de l'emploi est rigide, l'expression démocratique (vu de Suisse) l'est d'autant plus. Et l'impression d'être écouté, de compter dans la marche du pays, permettrait certainement une plus grande confiance et la création de plus d'emploi qu'un CPE inutile et timide.

Au sujet de la "perte" du secteur industriel, puisque nous sommes d'accord, j'aimerais juste revenir sur les bas salaires. Parce que les working poors, n'en déplaise à une personne qui exècre fondamentalement la mentalité étasunienne, c'est une importation des USA (enfin, je te l'accorde, de Thatcher aussi, qui a joué pleinement son rôle).
1/ Les boulots de working poors ne sont pas valorisants ; travailler des mois, des années, à faire un job de merde, pour un salaire qui ne te permet pas de subvenir aux besoin de ta famille, c'est démoralisant, c'est humiliant. Et plus cette situation perdure, plus l'individu s'en veut (et in extenso, en veut à la société toute entière).
2/ Les boulots de working poors ne sont pas rentables ; pour le travailleur en premier lieu (sinon, il ne serait pas pauvre, n'est-ce pas), et pour l'employeur, qui ne peut que très peu attendre de son employé. Ce dernier aspect est à relativiser toutefois, puisque la "manne" de travailleurs bon marché finit toujours par se développer, et la concurrence entre ces travailleurs permet à l'employeur de presser encore plus des personnes souvent déjà fragiles (économiquement, socialement, psychiquement, etc.).
3/ Les boulots de working poors tuent tout espoir d'ascenseur social ; entre le cumul des jobs (et le peu de temps qu'il te reste à disposition pour chercher autre chose) et la démotivation qui s'ensuit immanquablement pour l'individu, tu deviens working poors et tu le restes.

Alors je ne sais pas si ce sont les clichés des films US où l'on voit le jeune loup de 20 ans commencer comme stagiaire non payé pour un apprentissage d'aide-assistant coursier devenir PDG à force de volonté et pugnacité, mais dans la vie réelle et vraie, les working poors sont une réalité anglo-saxonne, dont le nombre va croissant année après année. Le PIB monte aussi bien aux USA qu'en Grande-Bretagne, les chiffres du chômage restent relativement bas, et les working poors augmentent. Je ne vois pas en quoi il y a réussite, exemple à suivre. Il est sûr que pour les investisseurs, l'image de ces deux pays est très bonne ; tout comme celle de la Chine, où l'on n'a presque plus besoin de payer de charges sociales.
Alors oui, souffrir quand il s'agit de défendre des grands principes et qu'on a raison comme c'était le cas pour l'invasion de l'Irak, mais pas quand il s'agit d'appliquer le droit légal et légitime.
Dans ma vision de la création du droit, le fait précède le droit. Donc quand quelque chose ne fonctionne pas, c'est qu'il manque justement des règles de droits. Je ne reviendrai pas sur le besoin français de réformer ses institutions, avant même de s'attaquer au marché du travail.

Tu as pris mon attaque personnelle (qui en était effectivement une, je t'ai trouvé extrêmement gonflé) dans un mauvais sens. Je suis pleinement conscient que c'est par choix que tu as décidé de travailler, et en cela tu restes fidèle à tes valeurs. Mais la direction que prenait mon attaque reposait sur le fait tu ne peux pas juger, toi, qui n'as justement pas besoin de ce boulot pour vivre, de ce que c'est que de dépendre d'un tel travail. Ce n'est donc évidemment pas ta condition, ton origine, ta culture ou tes amis que j'attaquais. Si je combat la discrimination, les raccourcis faciles, les présomptions de culpabilité, ça concerne tous les milieux sociaux, et pas seulement ceux qui me font envie. En cela d'ailleurs tu es assez représentatif, puisque le cliché "bon milieu social, donc glandeur" est méchamment pris en défaut avec toi. D'ailleurs, on se connaît trop bien pour que je pense ce genre de conneries ; non, c'est ton impossibilité matérielle (enfin, je crois qu'il y a aussi un manque d'envie) à te mettre dans la peau d'une personne qui n'a que des jobs misérables pour survivre. Une espèce qui se reproduit abondamment en ce moment, et que je n'aime pas que l'on chasse comme des nuisibles. Mêmes si ils manifestent...
Je vois aussi qu'ils ne se plaignent pas, même si c'est parfois dur et surtout très fatiguant. Il ne faut pas avoir peur de dire qu'en France il y a des gens (qui ne sont pas aussi peu nombreux qu'on veut bien le croire) qui préfèrent toucher les allocations chômage et autres plutôt que d'aller travailler, et je peux les comprendre, la différence entre le SMIC et ces allocs est minime, donc pourquoi se faire chier à se lever. C'est aussi pour cela qu'il faut baisser les charges, que les bas salaires souffrent moins et que par conséquent le travailleur touche plus et ait réellement envi de bosser.
De un, quelque soit le système, des parasites existeront. Social, culturel, économique, l'homme étant ce qu'il est – imparfait – il fait preuve d'une grande ingéniosité pour blouser le système. Mais la proportion est de par mon expérience – sociale suisse – négligeable, ne nécessitant qu'un dédain affirmé. Peut-être la situation est-elle différente en France concernant le chômage, je ne sais pas, je n'ai jamais lu d'enquête chiffrée sur le sujet. De deux, baisser les charges sociales, je te suis totalement. Mais il faut pour cela, dans la lancée, monter les charges sociales sur les salaires élevés ; je sais que de lire cela doit te hérisser le poil, mais tu ne peux pas en même temps maintenir des rentes de vieillesse avec une population active qui se réduit, et des retraités à chaque fois plus nombreux. A moins d'une croissance hors norme, que les Etats occidentaux ne sont pas prêt de retrouver (heureusement pour les écologistes, d'ailleurs).
Donc oui, baissons les charges sociales pour les travailleurs peu qualifiés, pour ceux qui en ont le plus besoins. Mais ça m'étonnerait qu'on se retrouve là-dessus, puisqu'on en a d'abord déjà discuté, et ensuite parce que c'est quand même ce qui différencie les hommes de droite et de gauche : l'égalisation matérielle.
Il est bon aussi de rappeler que la gauche avait touché le fond de la précarité avec les emplois jeunes: Un contrat d'un an, renouvelable 5 fois, ne donnant droit ni à une indemnité chômage ni à une formation, et dont le financement n'était même pas assuré. Soit bien pire que le CPE. Mais à cette époque là, bien sûr, il n'y avait personne pour descendre dans la rue...
Bon, je dois avouer deux choses : je ne me rappelle que vaguement de cette histoire d'emplois-jeunes dont la gauche française continue à se gausser, donc je ne pourrai pas dire grandchose d'intelligent sur le sujet. Et deuxièmement, je ne comprends pas ton raisonnement : il n'y avait pas de manifestants dans la rue ? Et tu t'en offusques ? Et si les gouvernants de l'époque avaient été plus à l'écoute de la population, s'étaient concertés avec les partenaires, contrairement à ce qu'il s'est passé pour le CPE ? Enfin, je ne comprends pas trop la critique que tu places à la gauche, pour le coup...
Alors que je comprends très bien, au contraire, le reproche fait au manque de concertation sur les 35h, puisque Aubry l'a fait souverainement, comme Villepin aujourd'hui. Je crois me souvenir aussi que les manifestations, notamment des hôpitaux, avaient été conséquentes ; que le ministre soit de gauche ou de droite, sa façon d'agir, d'être, est suivie de conséquences naturelles. Cela dit, je pense que Aubry n'aurait de toute façon aucune chance de faire passer sa loi autrement, et comme c'était une bonne loi, créatrice d'emploi, je n'y vois rien de mal. Enfin, on ne va pas déborder dans les 35h, c'est déjà assez compliqué comme ça, non ? )
Car oui, il y a un malaise en France, il vient du fait que les jeunes savent que leur avenir déchantera... Pour citer Barroso: "Tout le monde sait que l'on vivra avec moins de garanties, moins d'acquis, moins de bonheur que les générations précédentes", acceptons le enfin, comme l'ont fait nos voisins, en attendant des périodes meilleures.
Bien sûr, mais qui recherche à construire une période meilleures ? Les conservateurs ou les progressistes ? (Sans vouloir, encore une fois, légitimer outre mesure ces manifs).

Bon, je te (je vous) propose de passer sur le forum, qui est certainement plus approprié à de longues réponses, de longues enfilades, pour laisser de petites réponses assassines et courtes venir sur le blog.
psykotik
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Post by psykotik »

Histoire de prendre un peu de recul par rapport aux monstrueux rassemblements français d'hier (3 mio, il me semble avoir lu), une petite revue de presse du [url="http://www.swisstxt.ch/TSR1/100-00.html]teletext suisse[/url] :
La fronde anti-CPE dans la presse

La presse française et étrangère revenait largement jeudi sur les manifestations anti-CPE de la veille en France.

"Une foule jamais vue depuis 40 ans a envoyé Dominique de Villepin dans les cordes", résumait "La Repubblica" (I). En Suisse, "Le Temps" parlait du "triomphe de la rue" et "La Tribune de Genève" du "chant du cygne" de Villepin.

En France, "Le Figaro" insistait sur la crise qui s'est déclenchée sur le CPE entre D. de Villepin est N. Sarkozy. "Libération" appelait de son côté Chirac, "qui a laissé son Premier ministre trucider le dialogue social, à assumer son rôle d'arbitre en retirant le CPE".

En Norvège, le journal de référence "Aftenposten" (indépendant) estimait que J. Chirac (73 ans), qui "a régné pendant 11 ans", fait partie du problème.

"La France n'est plus gouvernable, en tout cas plus par le tandem Chirac-Villepin", abondait en Allemagne la "Sueddeutsche Zeitung" (centre-gauche).

Parlant de conservatisme et de peurs, le "New York Times" se demandait qui "sauvera la France de son malaise". En Espagne, la crise de l'Etat-providence (El Pais) et de "l'immobilisme" (ABC) faisait la Une. Efnin, Die Welt (D) dénonçait la "rigidité", fondée sur "des heureux temps révolus", des anti-CPE.
PJ

Post by PJ »

Ces jeunes réclament des CDI. Qu'ils sont loin des réalités économiques et du marché du travail actuel. Il est aujourd'hui rare pour un jeune, même bien diplômé, de trouver un CDI dès sa sortie de l'université ; cela n'est réservé qu'à une minorité, celle des grandes écoles, ainsi que les filières spécifiques, comme le droit où la médecine. La réalité aujourd'hui, c'est le CDD, le stage et l'intérim, situations autrement plus précaires que le CPE proposé : Un contrat d'une durée de trois mois renouvelable une fois au maximum sans allocations chômage à la fin, du travail à mi-temps, ou bien, un stage dont la rémunération est trop souvent bien en dessous de la valeur du travail fourni.
Voilà des propos qui me semblent émaner de quelqu'un qui n'a pas trop de soucis à se faire pour son avenir... On croirait entendre ces paroles que l'on prête à Marie-Antoinette : "S'ils n'ont plus de pain, qu'ils mangent de la brioche !". Paroles très certainement apocryphes mais qui me semblent néanmoins résumer ce qu'écrit Damien.

La lutte anti-CPE n'est pas une lutte en faveur du CDD et de l'intérim ! Il s'agit bien d'une lutte contre une précarité supplémentaire. Alors comme ça, ceux qui ne veulent pas du CPE n'ont qu'à faire une grande école ou se lancer dans médecine ! Sinon, qu'ils aillent se faire f... ! J'enseigne dans un LEP : dois-je donc transmettre à mes élèves ces quelques mots de "réconfort" ? En quoi devraient-ils, plus que d'autres, se résigner à devenir des Kleenex ? J'ai eu de nombreuses nouvelles de mes anciens élèves : effectivement, ils en ont bouffé, du CDD et de l'intérim. Faudra-t-il préciser que ce n'est pas pour autant d'un CPE qu'ils rêvaient ?...

PJ
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