Les revues intelligentes ne sont pas rentables et alors?

MalpensantePendant que chez nous certain défende la création de journaux gratuit comme moyen de démocratisation de l’information ici, en Colombie, on fête les dix ans de la revue Malpensante. Elle n’a, parait-il, jamais été rentable. Ils produisent à  perte depuis dix ans alors la question évidente serait comment font-ils pour continuer? …. Mais il paraît que cette question ne se pose pas.
L’intérêt immense de cette revue est que c’est probablement la seule qui va vraiment à  contre courant de toutes les idées imaginables, probablement même à  contre courant d’elle même, dans la mesure du possible.

Pour son anniversaire Malpensante s’est offert un petit festival où elle a invité différentes personnalités du monde culturel: poètes, écrivains, journalistes etc.

Pendant 3 jours tout ce beau monde est venu parler de différents thèmes et Fernando Vallejo, écrivain colombien, s’est particulièrement fait remarquer. Il a réussit en un temps record à  “pourrir” le monde entier et particulièrement Medellin. Selon lui la Colombie est le pire endroit du monde et Medellin est le pire qui existe en Colombie… C’est dire!

Il a aussi attaqué l’ancien Maire de Bogotà¡ l’accusant d’électrocuter les chiens de rue. Sinon le gouvernement d’Uribe est le pire que n’à  jamais connu la Colombie, mais ceux de Pastrana et de Gaviria n’ont pas été bien mieux! Les espagnols sont responsables de massacrer des ours etc. Les religions chrétiennes et musulmanes sont des plaies de ce monde…
Par contre il défend les curés pédérastes, en disant qu’un môme de 14 ans, si un curé ne le masturbe pas, il le fait tout seul…

Forcément sa prestation a fait réagir et c’était, sans doute aucun, le but. Jusqu’où peut aller la provocation et comment la maîtriser pour qu’elle reste compréhensible par la majorité. Une provocation trop acerbe est-elle utile pour l’avancée d’un débat?… voilà  un sujet pour le prochain numéro de Malpensante, dont la tradition de non rentabilité devrait se poursuivre. Pourvu que ça dure!

Musée de l’Or

Bogotà¡ est une ville d’altitude où le beau temps n’est pas vraiment constant. Après avoir eu 2 mois et demi de plus ou moins beau nous avons retrouvé le bonheur de la pluie, j’en avais déjà  parlé mais je ne pensais pas que la “saison du beau” était si courte. Un ami anglais me dit que c’est pire que Londres … j’avoue que je commence à  le croire!

Heureusement Bogotà¡ est une ville où les activités ne manquent pas, entre les cinés, théâtres et musées il y a de quoi s’occuper. Alors en ce dimanche pluvieux nous sommes retourné visiter el Museo del Oro, le musée qui possède la plus grande collection du monde de pièce en or.

representation de la scène d'intronisation du cacique

La majorité des pièces en exposition sont d’une beauté à  vous couper le souffle même après plusieurs visites. De plus la présentations faite par civilisation permet de retracer une partie de l’histoire de la Colombie. Sans aucun doute les Muiscas (région de Bogotà¡) sont les plus perfectionnistes dans leur travail de l’or et la célèbre légende de l’El Dorado se fonde sur une de leur coutume d’intronisation d’un cacique qui devait s’immerger, entièrement couvert de poudre d’or, dans la lacune de Guatavita près de Bogotà¡.
photo par Fab.

140000

140’000 personnes pour le troisième et dernier jour du festival rock de Bogotà¡. Depuis samedi une quarantaine de groupes se sont présentés lors du plus grand festival de rock en plein air d’Amérique Latine. Chaque jour était représentatif d’un style différent, on a d’abord eu droit au métal, ensuite au punk, et pour terminer au ska.

L’ambiance était agréable même si les règles de sécurité frôlaient l’absurde, on devait entrer à  pieds nus, pour montrer patte blanche! Et bien sûr la police manquait fondamentalement d’humour, un jeune provocateur voulant faire le malin s’est déshabillé et a tenté de passer le contrôle en caleçon, le pauvre s’est fait sortir à  coups de matraques!
Mais on peut comprendre la tension de la police, la veille (dimanche) un groupe de punks a réussi à  blesser 7 policiers.

Les groupes invités étaient autant de la scène locale qu’international, parmi eux on a pu voir Fear Factory (USA) ou El sie7e, il faut aussi noté la participation de Manu Chao qui nous a fait l’honneur de 2 concerts. Tout d’abord en compagnie de Dr Krapula (star local de Ska); les deux sont apparemment intimes et ont décidé de lancer le projet Seikywia (proyecto seikywia) qui se consacre au soutien des indigènes pour qu’ils fassent valoir leurs droits.

Ensuite Manu Chao est revenu le soir pour le final du festival, et son concert a déchaîné 140000 personnes pendant une heure et demie!
Il ne nous reste plus qu’à  espérer qu’il sorte un album (genre “radio seikywia“) et qu’il réussisse à  rendre la Colombie à  la mode…

En Avant!!!

Il y a quelques années Bogotà¡ était encore un lieu vraiment hostile pour les homosexuels. L’homosexualité était considérée comme un délit, alors la police pouvait les embarquer. C’est bien connu: les forces de l’ordre travaillent avec zèle lorsqu’il s’agit de “tare social”.

Selon certains témoignages les homos se faisaient embarquer et emmener dans les montagnes environnantes pour être déshabillé et lavé à  l’eau froide (à  3000 mètres d’altitude). Ensuite la police les abandonnait laissant avec leurs habits quelques kilomètres plus bas.

Dans certains quartiers où la présence paramilitaires reste forte les homos sont susceptibles de se faire tuer… ils appellent ça le nettoyage social. L’extrême droite a toujours eu beaucoup d’imagination.

Petit à  petit les choses changent, jamais assez vite bien sûr, mais au moins elle change. La mairie de Bogotà¡ a lancé une nouvelle politique publique en faveur des droits des homos : “Bogotà¡ Territoire de Diversité”

Même s’il ne faut pas espérer de changement du jour au lendemain on peut se réjouir de la reconnaissance officielle d’une transformation de la mentalité déjà  en cour.

On a déjà  pu voir une campagne d’affichage dans toute la ville appelant au respect malgré les protestations de l’église catholique.

La liberté avance, l’église recule.

On pourrait utiliser la même phrase de conclusion pour le résultat du jugement qui opposait l’église et la revue pour homme Soho. Une photo représentant la dernière cène avec une femme au sein nu à  la place de Marie Magdeleine (ou Jean selon la version) était à  l’origine de la discorde. Le tribunal a préféré la liberté d’expression comme valeur de la société colombienne … on ne peut que s’en réjouir.

Dans le même ordre d’idée la cour constitutionnelle, ultime instance juridique du pays, avait autorisé l’avortement il y a peu de temps, elle va un peu plus loin aujourd’hui en enlevant la possibilité aux institutions médicales de refuser l’avortement pour raison de conscience dans les cas de viols, malformation du fétus et de danger pour la femme.

Les choses bougent et on ne peut que s’en réjouir!

La mode

L’Amérique du Sud est vraiment une source d’inspiration sans fond, chaque heure représente une anecdote: l’Ambassadeur des Etats-Unis qui vient voir le Maire de Bogotà¡ car sa femme à  perdu son chien, le président Uribe qui réveille, à  2h du matin, toute la troupe de la garde présidentielle pour aller faire du cheval dans un parc de la ville, les histoires de séquestrations rocambolesques, etc. etc.

Une autre histoire fabuleuse est celle du Pérou, qui dans deux jours élit son nouveau président. Le choix doit être dur pour les Péruviens, je compatis sincèrement. Devoir élire soit un truand qui a déjà  montré sa capacité à  ruiner le pays à  la fin des années 80 soit un nationaliste à  moitié fou connu pour considérer les droits de l’homme comme superflus et les homosexuels de trop. Ollanta est un ex-militaire, paraît-il violent, qui veut suivre la vague bolivarienne et à  ce titre il est largement soutenu par Chavez.

La campagne péruvienne ne veut plus rien dire, tout le monde fait son petit commentaire: Chavez veut rompre ses relations avec le Pérou si le truand Garcia est élu; Fujimori, libéré sous caution, on ne sait pas pourquoi, fait sa politique depuis le Chili. Alan Garcia accuse Chavez d’envoyer des hommes pour perturber les élections, et bien sûr les uns accusent les autres de corruption et vice versa. à‡a ne s’annonce pas très joli.

On peut aussi parler de Chavez qui continue sa course à  l’armement. Il veut se défendre contre l’invasion des Etats-Unis, qui devrait entrer par le territoire colombien. Bien logiquement ça fait peur aux Colombiens, car même s’ils ont le meilleur armement de la région (directement fourni par les US à  travers le plan Colombie) on ne sait jamais ce qui peut se passer, peut-être que Chavez va craquer et lancer une attaque préventive….

Finalement à  Bogotà¡, c’est repos, on fait les comptes après les élections, et finalement tout le monde est content sauf les libéraux de Serpa, pour qui les résultats sont un peu durs à  avaler. La gauche festoie, elle n’a jamais eu autant de voix… Uribe prépare son nouveau gouvernement, ce qui ne va pas être très facile tellement de gens l’ont soutenu et il faut tous les remercier.

Mais, après cette petite mise en bouche politique, je me suis dit qu’il fallait que je parle d’autre chose, j’ai reçu des critiques: la politique, les conflits, les blabla et la vie alors? Ouais c’est vrai, surtout que les anecdotes sont tout aussi croustillantes, entre les entrées et sorties du Transmilleno qui ressemble plus au tournage de Godzilla qu’à  une scène de vie courante.

De plus je me suis souvenu que j’avais promis à  certains(es) suite à  la “dinde attitude” paru dans le Comet que je ferais une petite rubrique sur la mode à  Bogotà¡. La providence m’aidant, cette semaine était la semaine de la mode avec un certain nombre de défilés. Le temps de trouver 2 invitations (en VIP bien sûr!) et nous voilà  embarqués pour l’aventure des défilés. Les places VIP sont un échec, on voit bien mieux dans les normales mais bon on fait avec. Il y a une série de stylistes qui présentent leurs collections automne/hiver 2007. La première, Pepa Pombo est la plus intéressante, sa collection bien colorée, comme à  son habitude, est agréable à  regarder. Elle arrive à  combiner les couleurs d’une manière spectaculaire. La suite sera beaucoup plus triste le gris et le noir sont de rigueur, peu d’extravagance, certaines veste de Julieta Suà¡rez ont des coupes sympathiques mais rien de folichon.

Mais le plus triste de la soirée a été, pour moi, les mannequins. La mode européenne est arrivée jusqu’ici… les anorexiques, blondes, sans forme sont majoritaires. La musique est aussi top tendance, ambiance loundge, parfait pour s’endormir. Bref j’ai faim et je rêve d’une petite empanada pour me sauver de l’ennui. Après 2 heures on craque et on se sauve, la conclusion est que finalement la politique nous paraît plus divertissante, mais pour les motivées la semaine prochaine il y le fameux colombiamoda 2006 à  Medellin, sûrement magnifique, mais on n’ira pas…