George W. Bush et son administration resteront dans l’histoire pour avoir commis bien des impairs. Pour s’être trompés sur l’Irak, pour avoir ramené la torture dans les démocraties, pour s’être aliéné les alliés traditionnels européens, pour avoir ranimé avec une force jusque-là inconnue l’extrémisme, avoir été incapables de gérer l’ouragan Katrina, et j’en passe des meilleurs. Mais c’est surtout la guerre en Irak que l’on retiendra; bien décidés à en découdre, le gouvernement étasunien aura menti, associant le groupement terroriste Al Quaeda à l’Irak de Saddam Hussein; « la plus grande erreur de ma vie », dira Colin Powel, quelque temps après avoir compris s’être fait (sciemment ?) duper. Avec le recul, on comprends mal comment on pouvait imaginer une connexion entre Bagdad, qui en bonne dictature, était à la fois honnie par les islamistes de Bin Laden et pourchassée férocement par le gouvernement irakien, d’inspiration socialiste et donc plutôt éloigné de la religion. Une naïveté qui n’avait d’égal que la méconnaissance du dossier moyen-oriental.
Alors que Barack Obama s’est adonné à un discours révolutionnaire sur l’histoire esclavagiste US, appelant symétriquement son pays à tirer les enseignements du passé et à se réconcilier avec ses démons en allant de l’avant, le candidat présidentiel républicain John McCain, qui focalise sa campagne, tout comme Hillary Clinton, autour de son expérience et sa maîtrise des sujets complexes, se posant en expert des relations internationales, le présidentiable a dénoncé un supposé lien entre l’Iran et Al Quaeda, lors d’un speech en Jordanie. Il a, tout comme la Maison Blanche, procédé à un rapprochement impossible : alors que l’Irak est en proie à une guerre fratricide entre Sunnites et Chiites (deux obédiences musulmanes différentes), McCain a laissé entendre que la République islamique iranienne financerait et entraînerait les terroristes à l’origine des attentats du 11 septembre 2001.
L’Iran pourvoit aux besoins du Hezbollah, cela ne fait nul doute. Mais le Hezbollah est Chiite, tout comme l’est l’Iran. Imaginer ce dernier entraîner Bin Laden et ses amis est absurde, tout comme imaginer il y a quelques années que l’Irak pouvait financer ce même groupement islamiste. McCain l’a bien compris, puisqu’il s’est rétracté en remplaçant « Al Quaeda » par « extrémistes ».
On sait combien l’envie d’en découdre avec l’Irak a plongé les USA dans les affres de la guerre, prenant à contre-pied toutes les rapports factuels sur la situation en Irak. On sait combien McCain est critique vis-à-vis de l’Iran, et évoque sans tabous un bombardement des sites nucléaires. Est-ce que le vieux républicain a abattu ses cartes, dévoilant un jeu de va-t’en-guerre en Iran ? On peut craindre le pire. On a vécu le pire avec l’administration Bush, qui durant huit ans, a multiplié les bourdes, refusant d’entendre tout ce qui allait à l’encontre de sa propre politique. McCain révèle méconnaître profondément la région représentant l’un des dossiers le plus brûlant dont héritera le prochain président étasunien; est-il taillé pour un telle tâche ?